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mardi 7 avril 2020

Guacamole de testicules et paresseux géants

Le titre est on ne peut plus explicite, cet article traite de l’Histoire des avocats. Le fruit, pas le gars. Avant d'atterrir dans votre salade, votre petit avocat a traversé le globe depuis l’Amérique du Sud. Parmi les 6 millions de tonnes annuellement produits, il a eu l’honneur de faire partie des presque 100 000 tonnes importées en France (si c’est là que vous vivez…), deuxième pays le plus friand. Le tout avec une empreinte écologique assez terrifiante, entre une consommation d’eau importante (1000 litres par kilo d’avocats) et un transport qui nécessite camions, réfrigération en bateau et moult emballages (la bête est fragile). MAIS avant de faire ce long voyage géographique, les avocats ont dû faire un plus long voyage encore, un voyage à travers les âges...

Reconstitution de Megatherium (Source)


Dans les assiettes préhistoriques


Les avocatiers appartiennent à la famille des Lauraceae, un groupe vieux de plusieurs dizaines de millions d’années. Bien sûr, à l’époque, ils ne devaient pas tellement ressembler à la plante que l’on connaît aujourd’hui. Les fossiles ne laissent cependant aucun doute quant à la présence d’avocats préhistoriques dès le Pliocène, dans l’actuelle Californie(1), d’où ils se sont dispersés vers l’Amérique du Sud.

C’est là que le paresseux géant intervient. Nous sommes au Pléistocène (jusqu’à 2,6 millions d’années avant nous). Les avocats ont déjà la forme globale qu’on leur connaît. Avec une chair bien riche en graisses, appétissante… Une chair qui entoure la graine prête à être dispersée. Beaucoup des animaux actuels n’oseraient pas avaler tout rond un tel met (sachant que le noyau ressort plus ou moins intact…), mais nous sommes à la glorieuse époque de la mégafaune. “Méga”, car les animaux sont géants ! Et c’est probablement parce qu’ils ont co-évolué avec ces animaux que les avocats sont ce qu’ils sont : une graine énorme enfouie dans de la chair très nutritive(2).

Parmi les géants qui foulent l’Amérique du Sud au Pléistocène, on trouve plusieurs espèces de gomphothères, des colosses qui ressemblent à des éléphants. On trouve aussi le glyptodon, un tatou géant de la taille d’une voiture, et son cousin doedicurus, tout aussi cuirassé. Et bien sûr le célèbre mégathérium, paresseux géant qui peut se targuer d’être l’un des plus grand animaux terrestres à avoir existé, avec ses six mètres de long et ses quatre petites tonnes. Si vous passez par Paris, n’hésitez pas à leur rendre visite dans la galerie d’anatomie comparée du Muséum !

Reconstitution de Stegomastodon, un gomphotère d’Amérique du Sud (Source)

Reconstitution de Glyptodon (Source)
Fossile de Doedicurus (Source)

Squelette de paresseux géante Mégathérium au Muséum National d’Histoire Naturelle de Paris (Source)

La presque extinction des avocats


Tout allait bien dans le meilleur des mondes. Les animaux géants se délectaient des avocats, et les avocatiers suivaient le mouvement des géants depuis leurs intestins et profitaient de l’engrais naturel qui accompagnait le retour des graines au grand jour (vous voyez l’idée). Jusqu'à ce que le monde des avocats menace de s’écrouler : la mégafaune est en train de disparaître ! Peut-être à cause du réchauffement climatique qui accompagne la fin de l’ère glaciaire (pas la faute des hommes, une fois n’est pas coutume !).

Heureusement, les humains de l’époque ont aussi trouvé le fruit à leur goût (gageons qu’eux n’avalaient pas le noyau), et se sont mis à le cultiver(3). Même si la domestication a sans doute modifié l’allure que peuvent avoir les avocats, ils gardent cette grosse graine que seuls les géants herbivores arrivaient à avaler. Un anachronisme évolutif comme l’a appelé Barlow dans son livre sur “les fantômes de l’évolution”(2).

Petit point étymologique pour finir : “avocat” (en espagnol “aguacate”) est dérivé du mot “ahuacatl” en langue nahuatl. En plus de désigner le fruit, ce mot sert aussi à désigner les testicules. Rapport à la forme…



Références


  1. Schroeder CA. 1968. Prehistoric avocados in California. California Avocado Society, Yearbook 52: 29-34
  2. Barlow C. 2000. The Ghosts of Evolution: Nonsensical Fruit, Missing Partners, and Other Ecological Anachronisms. Basic Books, New York.
  3. Galindo-Tovar ME, Ogata-Aguilar N & Arzate-Fernandez AM. 2008. Some aspects of avocado (Persea Americana Mill.) diversity and domestication in Mesoamerica. Genetic Resources and Crop Evolution 55:441-450


jeudi 18 avril 2019

Étonnants chétognathes et gnathifères, va falloir s’y faire !

Il est facile de se laisser fasciner par les choses étranges. Un phénomène météorologique bizarre, une rue à l’ambiance particulière dans une vieille ville, un plat atypique dont on n’est pas sûr qu’on osera y goûter ou pas, ou un animal tordu... Eh ben comme de par hasard ici on va parler d’animaux tordus ! Et souvent avec ces animaux, le problème c’est de savoir où ils se trouvent dans l’arbre de la vie. Un exemple classique que beaucoup connaissent c’est l’ornithorynque, ce mammifère atypique qui a des points communs avec beaucoup d’animaux différents. Lors de sa découverte savoir de quel animal il était le plus proche n’était pas évident. Mais à force de recherches on a compris que c’était bien un mammifère, différent de nous ou des kangourous, mais quand même plus proche de nous que des lézards et oiseaux (qui pondent aussi des œufs comme l’ornithorynque). Notre cher mammifère aquatique à bec a cette chance, justement, d’être un mammifère, et beaucoup de gens travaillent sur ces animaux. Mais qu’en est-il des groupes plus lointains de nous ? Les vers marins ou autres insectes ? Eh bien beaucoup de ces organismes sont encore mystérieux et on ne sait pas où les placer dans la classification animale, mais comme avec l’ornithorynque avec le temps on va y arriver (j’en ai parlé iciici ou ici). Et récemment un des groupes les plus énigmatiques est probablement en train de trouver sa place bien au chaud au sein de l’arbre du vivant : Les chétognathe (à prononcer kétognate) !

Voici un chaetognathe, y’en a qui disent que ça ressemble à une flèche… Source : ceci n'est (vraiment) pas une b**e 

Les dents de la mer, version spéciale plancton


Bon, déjà c’est quoi un chétognathe ? Comme je l’ai déjà brièvement expliqué ici (zoo au plancton) ce sont des vers marins planctoniques. Ça veut dire que s’il y a trop de courant, pouf, ils se font emporter. Des organismes planctoniques il y en a beaucoup, et les chétognathes sont parmi les prédateurs les plus terribles sur la planète Terre… car ils chassent le copépode (dont je parle aussi dans mon article sur le plancton) ! D’autres amis planctoniques très, très, très abondants dans les eaux, mais aussi très agiles. Les chétognathes sont donc aussi parmi les plus communs et les plus efficaces des prédateurs. Corps effilé en forme de flèche (on les appelle aussi vers sagittaires ce qui signifie "vers flèches"), organes sensoriels perfectionnés, réflexes affûtés, et des mâchoires aux dents acérées pouvant injecter du venin. S’ils faisaient plusieurs mètres au lieu de quelques millimètres (voir centimètres pour les plus grands), ils seraient dignes d’un film d’horreur. En effet, si terribles qu’ils soient il est plus probable que vous en ayez avalé en buvant la tasse en mer, que l’inverse. Ces animaux omniprésents dans les mers et océans sont pourtant relativement peu connus et comme l’a dit Darwin, même aujourd’hui ils restent « remarquables par (…) l’obscurité de leurs affinités et par leur abondance inouïe dans les mers intertropicales et tempérées. ». 

Le cauchemar des copépodes, la tête du chétognathe, toutes dents écartées ! Source :  que vous avez de grandes dents !

3… 2… 1… Bor**l  classificatoire !


Le problème de la relation de parenté (phylogénie) des chétognathes avec les autres animaux est assez similaire, à leur échelle évolutive, à celui des ornithorynques. Ils ont des caractères qui ressemblent à ceux de différents groupes, allant des insectes à nous. Lorsqu’ils étaient étudiés uniquement sur la base des caractère morphologiques, leur développement embryonnaire semblait si proche du nôtre qu’ils ont été placé dans ce grand groupe appelé « deutérostomiens » (en rapport avec le développement justement, j’ai parlé en détails de ces animaux ici) qui donc comprends les vertébrés (nous, entre autres) mais aussi les étoiles de mer (exemple : Brusca et Brusca 2003). Puis quand on a étudié leur génome, on a commencé à les placer avec cet autre grand groupe, les « protostomiens » qui contiennent les mollusques et les insectes (et plein d’autres groupes très étranges). Et là aussi ce n’était pas si simple, car les résultats semblaient indiquer qu’ils étaient plus proches des Spiralia (aussi parfois appelés Lophotrochozoa selon les gens, pour que ce soit plus simple), qui comprennent les vers de terre et les mollusques (exemple : Matus et al. 2006). Mais d’autres recherches on aussi trouvé qu’ils étaient plus proches des ecdysozoaires (j’en ai parlé ici : histoire de mue) qui contiennent les insectes et autres bêtes à plein de pattes (exemple : Paps et al. 2009). On a aussi pensé que les chétognathes étaient simplement le groupe le plus proche des autres protostomiens (dans le jargon, on parle de groupe frère), c’est-à-dire qu’ils forment leur propre lignée (résumé par exemple chez Dun et al. 2014). Bref, déjà si vous avez tenu jusque-là je vous félicite, et pour vous récompenser, voici un arbre qui récapitule tout ça, vous allez voir j’ai juste mis les chétognathes partout…

Comme vous le voyez les chétognathes ont beaucoup voyagé dans la phylogénie, va falloir me démêler tout ça ! Sources : chétognatheOrnithorynque,  Polypterus (vertébré qui n'existe pas)Acanthaster (étoile de mer),  squille (la "crevette" jolie mais pas sympa), Popoillon, Nématode (ver rond. Voilà, l'es scientifiques ont pas trouvé mieux pour les décrire), Dugesia (ver plat qui louche. Là par contre c'est moi qui les appelle comme ça), ver de terreest-ce un cargo ? 

Encore des présentations de vers étranges…


Mais récemment, trois études scientifiques sont venues apporter des indices sur la position des chétognathes, qui trouveraient enfin leur place au chaud dans la phylogénie des animaux, et ces études semblent concorder ! Ce qu’il y a de plus convainquant c’est que ces trois études utilisent trois méthodes différentes : l’étude des gènes « architectes » de la morphologie des animaux, la comparaison des gènes pour faire une phylogénie, et la réinterprétation d’un fossile pourtant bien connu. Je ne vais pas tourner autour du pot longtemps, vu que ces trois études vont vous donner la réponse, les chétognathes seraient proches des… gnathifères !!! Mais oui mais oui ! Mes petits bébés chouchous avec les Micrognathozoa dedans ! Comment ça j’ai raté une étape de vulgarisation ? Faut expliquer ce que sont les gnathifères ? Ah oui ! Allez c’est parti, ça m’fait plaisir, je le fais rien que pour vous…

Déjà « gnathifère » signifie « qui porte des mâchoires » tiens tiens… Comme les chétognathes et leurs mâchoires soyeuses. Ils sont formés de trois groupes (taxons) : les gnathostomulides et les Micrognathozoa (mes chouchous sur lesquels j’ai travaillé !) dont je parle dans cet article : petits vers et les rotifères dont Sophie a déjà parlé ici. Ce sont des animaux aquatiques microscopiques qu’on trouve un peu partout sur la planète : dans le sol ou dans les mers. Ils ont des petites mâchoires qui leurs servent à plein de choses comme gratter les bactéries, chasser ou aspirer l’intérieur des cellules de plantes. Dans ce groupe, ce sont les rotifères les plus communs, et ceux qui ont la plus grande diversité de modes de vie, eux on les trouve partout partout ! Il y en a même probablement dans la terre de vos plantes de maison. Les gnathostomulides et les Micrognathozoa sont par contre plus rares. Les gnathostomulides se trouvent dans certains environnements marins vaseux, et les Micrognathozoa seulement dans certains cours d’eau douce d’une île du Groenland et d’une île australe. Mais les gnathifères ont été regroupés pas juste parce-qu’ils sont petits, mous et qu’ils ont des mâchoires, mais aussi parce-que la microstructure de leurs mâchoires est similaire entre ces trois taxons. En effet elles sont composées de bâtonnets qui, lorsqu’on les coupes et qu’on les regardes au microscope électronique, ont un intérieur sombre et un extérieur clair. Par ailleurs, les gnathifères possèdent très souvent une partie centrale de leurs mâchoires en forme de pince. Cependant comme ils sont souvent tout petits, et qu’à part les rotifères ils sont assez rares, il a fallu du temps pour qu’on arrive à avoir du matériel génétique pour confirmer que c’était bien un groupe naturel, appelé groupe monophylétique, et c’était bien le cas (Laumer et al. 2015) !

(N'hésitez pas à cliquer pour agrandir ! Ces animaux ne mordent pas ! Enfin si, mais pas en photo.) Présentation des différents gnathifères et leurs mâchoires. Sources : Gnathostomulida, Gnathostomula paradoxa, Micrognathozoa, Limnognathia maerskianimalmâchoires, Rotifera, Testudinella patina, animal, mâchoires.

La structure générale et la microstructure interne des mâchoires d’un gnathifère constituées de bâtonnets avec l’intérieur sombre et l’extérieur clair (Gnathostomula paradoxa), d’après Herlyn et Ehlers, 1997.

Un secret partagé entre les rotifères et les chétognathes


La première étude à mettre les pieds dans le plat quant à la relation de parenté entre les chétognathes et les gnathifères c’est celle de Fröbius et Funch en 2017 (tout ça est relativement récent donc). Funch c’est quand même un des deux types qui a décrit les Micrognathozoa… Cette étude est une des premières à s’intéresser à la répartition des « gènes Hox » chez le rotifère Brachionus manjavacas. Les gènes Hox, c’est les gènes qui permettent la mise en place des différentes parties du corps d’avant en arrière chez les animaux. Autant dire qu’ils sont importants pour le développement embryonnaire. On  les utilise souvent pour mieux comprendre l’évolution entre différents taxons. Si une partie exprime les mêmes gènes Hox chez deux animaux différents, on va supposer qu’ils ont la même origine évolutive (jusqu’à preuve du contraire). C’est pour ça que beaucoup de chercheurs comparent l’expression des gènes Hox chez différents animaux pour pouvoir faire des hypothèses sur quelles parties de leur corps ont la même origine évolutive. Et qu’ont fait Fröbius et Funch à votre avis ? Ben ils n’ont pas comparé l’expression de ces gènes entre gnathifères (enfin ils ont regardé chez un rotifère quand même). Oh je ne leur jette pas la pierre, les gnathifères et les chétognathes c’est des animaux difficiles à manipuler en laboratoire (on est loin de l’organisme modèle docile sous la pipette hein). Par contre ils ont trouvé quelque chose d’assez intriguant quand même. En étudiant quels gènes Hox du rotifère B. manjavacas étaient présents dans son génome ils en ont trouvé un qui avait été déjà été décrit dans le génome des chétognathes, le gène MedPost. Et comme les gènes Hox sont importants pour le développement, on estime que le partage de la présence d’un même gène Hox est un argument fort a priori pour regrouper deux organismes. Par ailleurs ils ont quand même décrit l’expression de ces gènes Hox chez B. manjavacas ce qui offre des informations importantes pour les prochains travaux qui s’intéresseront à cette problématique. Cependant je reviendrai plus tard sur les critiques qu’on peut émettre. Reste que c’est une découverte très intéressante et qu’on espère que les prochaines études fouilleront un peu plus de ce côté-là.



(Cliquez pour agrandir) Résumé des différents gènes Hox qu’on retrouve chez les Spiralia. Remarquez surtout les gènes MedPost que l’on ne trouve que chez les chétognathes et les rotifères. Remarquez aussi qu’il manque du monde, j’ai nommé les Micrognathozoa et les gnathostomulides… Source Fröbius et Funch 2017


Encore des phylogénies !


L’autre étude encore plus récente de Martélaz et al. publiée en 2019 est celle qui place les chétognathes plus sérieusement dans la phylogénie grâce à la comparaison des séquences moléculaires. Pour ce faire, ils ont échantillonné plein de chétognathes, une dizaine d’espèces, ce qui est assez rare pour être signalé. Malheureusement, l’échantillonnage reste relativement faible en ce qui concerne les gnathostomulides, les rotifères et les Micrognathozoa (haha je rigole, il n’y a qu’une espèce de Micrognathozoa de toutes façons, je vous ai bien eu !). Et ils trouvent que les chétognathes sont proches (donc groupe frère) des gnathifères (et même dans certains de leurs arbres ils les trouvent dedans !). Voilà qui vient confirmer les résultats de l’étude précédente, qui rapprochait les rotifères des chétognathes ! Ce qu’il y a d’intéressant dans tout ça et sur quoi je n’ai pas encore insisté, c’est que le groupe [chétognathes + gnathifères] (on va dire gnatifères au sens large) sont le groupe frère du reste des spiraliens. Ce qui veut dire que comprendre leur évolution, c’est mieux comprendre l’évolution des spiraliens, vu que c’est un groupe qui s’est formé au début de leur évolution. Et comme les spiraliens c’est un des groupes animaux parmi les plus importants en termes d’espèces et de diversité, c’est aussi important pour comprendre l’évolution des animaux en général ! Ça met ces groupes, jusque-là souvent vus simplement comme des « groupes chelous », sur l’avant de la scène zoologique !

Résumé des relations de parentés entre les Spiralia et les chétognathes tels que résumés par Martélaz et al. 2019. Sources : chétognathe,  Micrognathozoa, Rotifera, Gnathostomulida Sterrer et Sørensen 2014, Gastrotricha,, Dugesia (ver plat)ver de terreescargot 

l’Ami Amiskwia rejoint le club


La dernière découverte de cette histoire est paléontologique cette fois-ci et provient d’une étude effectuée par Vinther et Parry et publiée récemment, en mars 2019. Ici les auteurs s’intéressent à un fossile qui a longtemps embêté les paléontologues : Amiskwia sagittiformis. Tiens, « sagittiformis » veut justement dire en forme de flèche, comme les chétognathes ! En effet, les scientifiques ont vite rapproché cet animal des chétognathes grâce à la présence de nageoires latérales, ce qui à vrai dire, ne court pas les rues chez les animaux ! Le problème c’est que cette bête a deux tentacules et pas de mâchoires, et ça, c’est pas très très chétognathe… Voyez plutôt : 


Vue d’artiste d’Amiskwia sagittiformis remarquez les deux trucs noirs à l’avant on va y revenir… L’animal faisait 2-3cm. source : ver fossile chelou

Cependant, quand je dis que les chétognathes n’ont pas de tentacules, certains du genre Spadella, ont des petites antennes tentacules trop mimi ! Mais mieux, Shu et al. en 2017 ont redécrit un chétognathe fossile, Protosagitta, en l’affublant de tentacules à l’avant de la tête (cependant Vinther et Parry pensent qu’en fait c’est pas un fossile de Protosagitta que Shu et al. ont trouvé mais... d’Amiskwia…) ! Ok et les mâchoires alors ?   Ben les deux structures noires que vous voyez dans la tête d’Amiskwia ont été redécrites par Vinther et Parry justement comme des structures symétriques en formes de mâchoires. Mais ça ressemble pas aux dents acérées des chétognathes me direz-vous ! Non, par contre ça ressemble un peu aux mâchoires des gnathifères. Ces auteurs vont encore plus loin. Amiskwia et les chétognathes ne seraient pas juste groupe frère des gnathifères ! C’en seraient ! Même qu’ils seraient plus proches des rotifères que des Micrognathozoa et des gnathostomulides... Cependant je resterais assez prudent sur ces conclusions, puisque les caractères qu’ils ont utilisé dans leur analyse sont assez mal renseignés pour les Micrognathozoa et les gnathostomulides. Reste que placer Amiskwia proche des gnathifères ne semble pas absurde vu les structures décrites. Donc ça ferait d’une pierre deux coup, on place les chétognathes et en bonus ce fossile mystérieux !

Le fossile d’Amiskwia et l’interprétation de ses mâchoires. Evident non ? Moi, comme d’hab’, j’fais confiance aux paléontologues... Source : Vinther et Parry 2019.

Conclusion critique du zoologiste un peu trop enthousiaste


Mais vous ne croyiez pas que j’allais laisser passer tout ça facilement alors que j’ai quand même travaillé sur les pauvres et délaissés gnathifères ? Un des problèmes c’est que justement les gnathifères sont très peu étudiés, alors il y a très peu de données sur le sujet et peu de chercheurs se sont intéressés à ce groupe. En tant que morphologiste déjà soyons clair, ça ne me dérange pas que les chétognathes soient groupe frère des gnathifères (même si bon, les chétognathes sont tellement chelous qu’on les mettrait n’importe où, ça ne me choquerait pas). Déjà l’étude de Fröbius et Funch est très intéressante et je suis relativement convaincu par le gène MedPost partagé par les chétognathes et les rotifères, cependant, les spiraliens sont des organismes dont le génome évolue très, mais alors très vite (ou le nôtre évolue lentement ?), et particulièrement pour les petites bêtes comme les gnathifères et d’autres spiraliens qui sont tout aussi riquiquis (les gastrotriches par exemple dont je parle ici). Toute conclusion doit donc être prise avec des pincettes (ou des petites mâchoires) tant qu’on ne regarde pas plus de spiraliens, et dans ce cas notamment les gnathostomulides et les Micrognathozoa. 

Bon, ça c’est des remarques générales, mais là je vais rentrer dans les détails, mais c’est trop tentant. Puis le but de la science c’est aussi de pouvoir être critique bon sang ! Ce qui m’ennuie un peu avec ces études aussi c’est l’utilisation du nom « Gnathifera » justement. Les gnathifères c’est bien défini, c’est des organismes avec des mâchoires formées de tubules et d’une partie en forme de pince. Que les chétognathes en soient groupe frère pourquoi pas, mais dire que ce sont des gnathifères c’est autre chose, parce-que ça laisse penser que les mâchoires des chétognathes et des gnathifères ont la même origine évolutive. Or d’après mon humble avis, rien n’est moins sûr en l’état actuel des connaissances. Déjà la structure des mâchoires des chétognathes est différente de celle des gnathifères, je vous laisse juger :

Section d’une dent de chétognathe à gauche. Elles sont formées d’une forme de pulpe plutôt que de petit tube, tubes que vous pouvez voir à droite où l’on voit une section de mâchoires de gnathostomulide. Les deux images sont des sections de mâchoires vues au microscope électronique à transmission. Source : Bone et al. 1983 et Herlyn et Ehlers, 1997

L’autre truc c’est que les mâchoires c’est quelque chose qui apparaît très souvent chez les animaux. Mais vraiment très souvent. Une vague ressemblance et une position proche dans la phylogénie ne suffit pas à pouvoir dire qu’elles ont une même origine évolutive. Puis ça dépend aussi ce qu’on appelle mâchoires ! Certaines chez les rotifères ne servent pas à mâcher mais de piston pour aspirer de l’eau (et des proies) ! Certaines comme chez les gnathostomulides semblent plus servir à gratter les bactéries ! Ou chez certains vers plats, voire même chez les chétognathes, elles servent à attraper !



Diversité des mâchoires chez les animaux. En haut à gauche, les mâchoires d’une terrible eunice, une annélide, source : ver ouille, en haut à droite, un schéma des mâchoires d’un mollusque : Puncturella noachina source : Vortsepneva et al. 2014. En bas à gauche, les cinq dents des mâchoires bizarres des oursins. L’organe est plus joliment appelé « lanterne d’Aristote » source : mâchoires poétiques. Et en bas à droite les mâchoires d’un ver plat, Cheliplana. Ces mâchoires sont sur le nez et pas autour de la bouche ! Ils les sortent et s’en servent pour amener la proie à la bouche ! Source : Uyeno et Kier 2010.

Le dernier argument qui me fait douter du fait que les mâchoires des chétognathes et des gnathifères ont la même origine c’est leur position ! Déjà, les dents des chétognathes ne sont pas à l’intérieur du pharynx, contrairement aux gnathifères, ensuite les gnathifères ont quasiment toujours une partie centrale en forme de pince, et les gens qui travaillent dessus pensent qu’elle a la même origine évolutive pour tous les gnathifères. Or les chétognathes n’ont pas cette partie non plus. Pour Amiskwia c’est un peu plus compliqué. Les mâchoires (supposées, c’est un fossile quand même) d’Amiskwia sont bien dans le pharynx, par contre, il n’a pas encore été montré qu’elles étaient attachées entre elles pour former une pince. Une homologie avec les mâchoires de gnathifères est donc plus probable mais pourrait être mieux étayée. Mais qui sait, peut-être qu’on trouvera d'autres fossiles qui vont clarifier tout ça ? 

Comparaison des différentes mâchoires des gnathifères en vue ventrale et supposément apparentés. Les mâchoires sont en rouges et les parties centrales en forme de pince (supposée avoir la même origine évolutive) sont en mauve. L’appareil digestif est en bleu. Profitez en bien, ça m’a pris un temps monstre à faire cette figure ! Rotifera : Dicranophorus et Gnathostomulida : Gnathostomaria 

Alors les chétognathes proches des gnathifères ? Il semble bien que oui, ils ne sont plus orphelins comme avant ! Hourra ! Mais de là à penser que leur mâchoires sont les même que celles des gnathifères, je ne pense pas ! Comme quoi ce n’est pas parcequ’ils sont placés dans la phylogénie que tous les mystères sont résolus ! Si les chétognathes perdent un peu de leur romantique mystère phylogénétique (je pense ce que je veux ok ?) ce sont toujours des organismes étranges, tout comme les gnathifères, dont leur rapprochement créé un groupe encore plus étrange ! Si c’est pas pour me plaire ça !!! Va y avoir des choses à résoudre en zoologie entre tout ça mes amis !


Sources :

Bone Q., Ryan KP. Et Pulsford AL. 1983. The structure and composition of the teeth and grasping spines of chaetognaths. Journal of the Marine Biological Association of the United Kingdom. 63(4) p929-939. https://doi.org/10.1017/S0025315400071332  

Brusca RC et Brusca GJ. 2003. Invertebrate, 2nd Edition. Sinauer Associates, Inc. ISBN13: 9780878930975

Dunn CW., Giribet G., Edgecombe GD., et Hejnol A. 2014. Animal Phylogeny and Its Evolutionary Implications. Annual Review of Ecology, Evolution, and Systematics. 45:371-395. https://doi.org/10.1146/annurev-ecolsys-120213-091627

Fröbius AC. et Funch P. 2017. Rotiferan Hox genes give new insights into the evolution of metazoan bodyplans. Nature Communication. 8(9). https://doi.org/10.1038/s41467-017-00020-w

Herlyn H. et Ehlers U. 1998. Ultrastructure and function of the pharynx of Gnathostomula paradoxa (Gnathostomulida). Zoomorphology. 117:135–145. https://doi.org/10.1007/s004350050038

Laumer CE., Bekkouche N., Kerbl A., Goetz F., Neves RC., Sørensen MV., Kristensen RM., Hejnol A., Dunn CW., Giribet G. et Worsaae K. 2015. Spiralian phylogeny informs the evolution of microscopic lineages. Current Biology. 5(15). https://doi.org/10.1016/j.cub.2015.06.068

Martélaz F., Peijnenburg KTCA., Goto T., Satoh N. et Rokhsar DS. 2019. A New Spiralian Phylogeny Places the Enigmatic Arrow Worms among Gnathiferans. Current Biology. https://doi.org/10.1016/j.cub.2018.11.042

Matus DQ., Copley RR., Dun CW., Halanych KM., Martidale MQ. Et Telford MJ. 2006. Broad taxon and gene sampling indicate that chaetognaths are protostomes. Current Biology. 16(15), PR575-R576. https://doi.org/10.1016/j.cub.2006.07.017

Paps J., Baguñà J et Ruitort M. 2009. Bilaterian Phylogeny: A Broad Sampling of 13 Nuclear Genes Provides a New Lophotrochozoa Phylogeny and Supports a Paraphyletic Basal Acoelomorpha. Molecular Biology and Evolution, 26(10):2397–2406. https://doi.org/10.1093/molbev/msp150

Shu D., Conway-Morris S., Han J., Hoyal Cuthill JF.,  Zhang Z., Cheng M. et Huang H. 2017. Multi-jawed chaetognaths from the Chengjiang Lagerstätte (Cambiran Series 2, Stage 3) of Yunnan, China. Palaeontology. 60(6) p763-772. https://doi.org/10.1111/pala.12325

Uyeno TA. et Kier William. 2010. Morphology of the Muscle Articulation Joint Between the Hooks of a Flatworm (Kalyptorhynchia, Cheliplana sp.). Biological Bulletin. 218 p169-180. https://doi.org/10.1086/BBLv218n2p169

Vinther J., et Parry LA. 2019. Bilateral Jaw Elements in Amiskwia sagittiformis Bridge the Morphological Gap between Gnathiferans and Chaetognaths. Current biology. 29, 1–8. https://doi.org/10.1016/j.cub.2019.01.052

Vortsepneva E., Ivanov D., Purschke G. et Tzetlin A. 2014. Fine Morphology of the Jaw Apparatus of Puncturella noachina (Fissurellidae, Vetigastropoda). Journal of Morphology. 275 p775–787. https://doi.org/10.1002/jmor.20259

Nicobola

jeudi 4 septembre 2014

Un nouveau casse-tête pour les zoologistes

Ça courrait dans les couloirs de mon université depuis quelques mois, mais enfin, hier, la description d’une nouvelle énigme zoologique a été publiée…

Il arrive que les zoologistes crient au nouvel animal. Et souvent, ça tombe dans une case qu’on connait. Pour n’en citer que deux jolis cas, le premier est celui des Concentricycloidea  (un nom bien barbare) pris pour un tout nouveau type d’échinodermes (oursins, étoiles de mer, plus d'infos ici, ou ), mais qui se sont révélés être seulement des étoiles de mer. Le second cas est celui de Buddenbrochia  (encore un avec un nom pas possible), longtemps resté une énigme zoologique totale (vraiment aucune idée, si ce n’est que c’est un animal), jusqu’à ce qu’on réalise que c’était un cousin des méduses, au sein d’un groupe bien connu de parasites.


Un Concentricycloidea à gauche et un Buddenbrockia à droite. A première vue ils ne ressemblent pas à grand-chose, et c’est bien pour ça qu’ils ont été des énigmes pendant un bout de temps. Source: paquerette de mer et ver mystère.



Hier, c’est un nouveau candidat au titre d’animal «incertae sedis » (placement incertain) qui a fait l’objet d’une publication. Et pour ne pas déroger à la règle des noms, il a été nommé Dendrogramma. Trouvé au fond des mers australiennes, de 400 à 1000 mètres de profondeur, cet humble animal d’un demi centimètre fait déjà beaucoup parler de lui. Alors, c’est quoi ce truc ? Il a été décrit comme un animal « non bilatérien », c'est-à-dire un animal qui n’est pas composé de deux côtés symétriques comme nous. Un animal sans avant, sans arrière, sans gauche, sans droite, mais avec une bouche (face orale) et un côté opposé à la bouche (face aborale). Comme expliqué précédemment (ici), définir un groupe sur une absence, c’est pas très élégant, et ça fait des groupes qui n’existent pas, comme les poissons. Le groupe des « animaux non bilatériens » donc, n’existe pas, mais la découverte d’un nouvel animal non bilatérien est quand même une belle trouvaille. Parce que les bilatériens comprennent plus de 95% des espèces animales décrites, et parce qu’il n’y avait jusqu’alors que 4 groupes d’animaux non bilatériens bien définis : les éponges de mer, les cnidaires (méduses et coraux), les gracieux cténophores et le mystérieux placozoaire (avec une seule espèce décrite). Autant dire que même si les cnidaires et les éponges contiennent un nombre raisonnable d’espèces, on n’a pas grand monde en dehors des bilatériens. En plus les relations de parentés entre les non bilatériens sont loin d’être établies et beaucoup de discussions persistent (voir les discussions sur SSAFT). Mais ce que cette histoire de Dendrgramma nous dit en plus c’est que notre nouvel ami pourrait nous en apprendre beaucoup sur les origines des animaux !


Une gracieuse méduse, un des animaux non bilatériens que vous connaissez le mieux. Source : spaghettis nageant

Euplectella, la délicate éponge de verre. Source : aille ça pique.

Un fragile cténophore, ces animaux qui donnent mal à la tête aux zoologistes. Source : cténotrofort.

Un heuu... Ttruc appellé placozoaire. C'est un blob plat, et jusque là, c'était le plus mystérieux des animaux non bilatériens. Source : pauvre animal délaissé.


Oui mais…
Mais la réalité en zoologie ce n’est pas toujours si simple et le matériel utilisé n’est pas en si bon état. Si bien que les auteurs du papier sont resté très prudents. Ils auraient pu décrire cet animal comme un nouveau phylum, le plus haut rang au sein des animaux, le Graal du taxonomiste. Qu’importe le nombre d’espèces dans un phylum (une pour les placozoaires, un million pour les arthropodes), les membres d’un même phylum sont organisés de manière suffisamment distincte pour être placés ensemble, mais sont suffisamment différents du reste pour qu’il soit, à première vue, difficile de les relier à un autre phylum. Bref, les auteurs ont rechigné à décrire les Dendrogramma comme un nouveau phylum. Pourtant, pour avoir discuté avec eux, les scientifiques qui ont relu et commenté leur article (c’est comme ça qu’on publie en science, des gens doivent approuver l’article avant) leur auraient même proposé de le faire. Alors, pourquoi ne pas avoir sauté le pas et ajouté un nouveau phylum aux animaux ? D’autant plus qu’un des auteurs en a déjà décrit 3, c’est pas comme s’il avait l’habitude (et j'en ai parlé ici !) ! Déjà, pas mal de gens n’aiment pas les « phylums », bah, c’est de la dispute de zoologistes, je ne rentre pas dans les détails. Ensuite, les organismes ont été mal fixés, c'est-à-dire qu’ils ont été récoltés il y a presque 30 ans et gardés de côté depuis. Malheureusement, aucun autre spécimen n’a été récolté depuis, malgré plusieurs essais. Ca implique que malheureusement, aucun ADN n’a été récolté. Et aujourd’hui, pour justifier une grande découverte zoologique, il faut de l’ADN (ça se critique ou pas, bref). Plusieurs scientifiques qui ont déjà commenté cette découverte ici (ça a fait beaucoup de bruit), prétendent qu’ils pourraient en extraire de l’ADN quand même. Toujours est-il que les auteurs de ce nouvel article n’avaient pas la possibilité de le faire, c’est comme ça. Et le matériel lui-même était vieux et difficile à étudier. Tellement que leur appartenance aux animaux elle-même a été mise en doute. En effet, les spécimens ont été récoltés en 1987, il y a 27 ans… Et les spécimens ont passé ce temps dans le formol et l’alcool, rendant leur morphologie difficile à interpréter. Ça implique aussi qu'ils ont été tués et conservés dès qu’ils ont été récoltés (c’est comme ça qu’on procède en mission en haute mer), si bien que ces animaux n’ont jamais été observés vivants !


Nos étranges Dendrogramma. Les larges avec une astérisque à gauche, sont une autre espèce que les autres plus petits. Source: la publication originale que vous devriez lire.

Alors, à quoi ressemblent nos nouveaux amis (attention, partie morphologie !). Deux espèces ont été décrites. En gros ce sont des disques avec une tige au milieu. Oui, ça ressemble à des champignons ! Cette tige porte la bouche à son extrémité (et les champignons n’ont pas de bouche, dommage), qui semble présenter des cellules glandulaires. Ces cellules permettraient de créer du mucus pour piéger les particules qui flottent dans le fond des mers Australiennes. Au sein de cette tige, la bouche débouche (forcément) sur un canal qui descend jusqu’au centre du disque et va se ramifier de manière dichotomique (deux par deux) jusqu’à atteindre les bords du disque. Ce canal semble remplis de larges cellules. Malheureusement comme les spécimens sont vieux, il est dur de savoir si ces cellules forment bien une cavité quand le spécimen est vivant et/ou se nourrit. Cependant, chez certains animaux, l’intestin au repos ne présente en effet aucune cavité. L’animal n’a que deux tissus cellulaires : des cellules « endodermiques » présentes dans ces tubes, et des cellules « épidermiques » présentes à l’extérieur de l’animal. Entre les deux se trouve une substance, la mésoglée, qui, selon les endroits, a une texture fibreuse ou spongieuse. Deux espèces ont été décrites. Une large, Dendrogramma discoides, dont le disque mesure autour d’un demi centimètre, et avec une tige courte et un disque bien rond, et une petite, mesurant autour de deux millimètres, avec une longue tige et une entaille dans le disque.



Détails de la morphologie de notre nouveau venu chez les animaux. Source: encore la publi orginale, allez, lisez là.

En réalité ces caractères (canaux, une bouche et pas d’anus, deux tissus, une mésoglée) sont présents chez les cnidaires et les cténaires, ces autres animaux non bilatériens que j’ai évoqué plus haut. Mais nos Dendrogramma ne présentent aucun des autres caractères spécifiques à ces deux groupes (que je ne vais pas détailler, à moins que vous me le demandiez), ce qui les en exclu. Cependant ils pourraient être de proches cousins. Malheureusement encore, les relations de parentés entre ces organismes sont encore mal comprises, la morphologie de ces organismes est mal préservée, et aucun ADN n’a été prélevé. Il va falloir attendre de nouvelles recherches. Et aux vues des nombreuses réactions déjà existantes, on espère que ça va aller vite. Une petite critique pourrait être faite : l’entaille de Dendrogramma enigmatica pourrait présenter une forme de bilatéralité, et donc ces animaux auraient en effet deux côtés, comme les bilatériens. Ceci dit, une petite touche de bilatéralité se trouve aussi chez les animaux non bilatériens : par exemple l’intestin des anémones l’est clairement. Rien de bien informatif donc, d’autant plus que Dendrogramma discoides ne présente pas cette entaille.

Les relations de parentés entre les animaux non bilatériens, les bilatériens et Dendrogramma vues par les auteurs du nouvel article. Source: mais vous allez le lire cet article oui ?


Aussi, d’autres hypothèses ont été proposées, lors de la publication, mais aussi après discussion avec quelques collègues hier. Est-ce que ça pourrait être des écailles de vers à élytres (souris de mer par exemple). Ces écailles n’ont pas de bouche, et même si l’image ci-dessous montre des similarités (l’aspect ramifié), elles ne sont que superficielles (ces ramifications sont des nerfs). Pareil avec les « pensées de mer » (traduit de l'anglais) qui y ressemblent fortement, mais qui ont une organisation très différente (c’est une colonie de petites animaux, apparentés aux coraux).

Harmorthoe, un ver à écailles. Et si Dendrogramma n'était que des écailles perdues ? Peu probable. Source : ver blindé.


Photo de microscopie confocale d'un écaille de ver à écailles. La ressemblance a un peu intrigué lers auteurs, mais non, ça colle pas. Source : la photo m'a été donnée par un collègue et ami à moi Brett.


Une "tapette de mer", Renilla reniformis. Un truc qui ressemble quand même au Dendrogramma... Source : cnidaire échoué.


Autre chose à se mettre sous la dent ? Oui, et pas n’importe quoi. Ce qui fait grand bruit avec cette découverte, c’est que ces animaux ont été comparés avec des fossiles qui datent du fond des âges, il y a 600 millions d’années, probablement pas bien longtemps après que les animaux soient apparus. Ces fossiles datent de l’édiacarien, où les animaux présentaient des formes étranges, et encore, l’appartenance de ces fossiles aux animaux a elle aussi été discutée (tiens tiens, comme les Dendrogramma). L’organisation des canaux et l’aspect discoïdal ressemble fortement. Mais y’a un hic, comme toujours, c’est que les canaux de ces animaux Ediacariens présentent une symétrie en trois au centre, alors que les Dendrogramma n’ont que deux canaux qui partent du centre. Une histoire à creuser donc, mais passionnante. Qui sait, ces étranges organismes du fin fond des âges pourraient avoir survécu finalement ! Jusqu’alors les pauvres avaient été décrits comme un échec de l’évolution (et ça, ça m’énerve en plus !), ce serait un bel exemple d’une incroyable découverte de quelque chose que l’on pensait disparu. Et même si c’était une convergence évolutive, ça montrerait que ces organismes n’étaient pas tellement un échec, et que d’autres animaux les ont même copié (bien sûr pas consciemment, on parle d’évolution quand même) !


Reconstitution, pas très artistique de Rucognites, un des vieux trucs fossiles qui ressemble quand même drôlement à Dendrogramma. Source : Notre ami wikipédia

Une reproduction plus artistique, de la faune d'Ediacaria. Source: vieux animaux.

Pour finir, je dirais que malgré cette effervescence autour de cette découverte, il faut rester prudent, tout comme les auteurs l’ont fait. Il faut toujours le temps pour qu'une nouvelle découverte scientifique se décante. Que la communauté scientifique commente et critique, qu’elle lance de nouvelles recherches. Comme l’a dit l’un des auteurs dans une interview « cette publication est un appel à l’aide » et à la vue des premières réactions, il a été entendu. Et dans tous les cas, il fallait bien publier ça, même si les résultats sont incomplets, ça stimule la communauté et nous fait rêver : au fin fond des mers il y a encore plein de belles découvertes. 

Pour aller plus loin :

L'article original, quand même : 


Et pour les curieux, un article où je parle, entre autre d'autres découvertes similaires passées d'un des auteurs de l'article dont j'ai parlé ici : vers infiniment petites et au delà !




mardi 10 avril 2012

Le mystère des conodontes

Les paléontologues sont des gens qui savent souvent faire preuve d'abnégation. Comme par exemple lorsqu'il s'agit d'étudier pendant des décennies des organismes dont on ne connaît ni la nature, ni l'apparence, ni le mode de vie… Prenez les conodontes, par exemple. Ces fossiles, qui ressemblent à des dents (d'où leur nom qui signifie "dents en cône") sont connus depuis le milieu du XIXème siècle. Ils sont minuscules (de l'ordre d'un millimètre), et donc difficiles à étudier. Pourtant, il existe de nombreux conodontologues à travers le monde. Pourquoi ? Eh bien figurez-vous que les conodontes sont d'excellents fossiles stratigraphiques. Cela signifie qu'on les trouve en grande quantité dans certaines roches, à savoir dans les sédiments marins de l'ère Primaire et du Trias.
Quatre types différents de conodontes sur une tête d'épingle (MEB). Source

Pour situer un peu, je rappellerai que l'ère Primaire (ou Paléozoïque) constitue la première portion (la plus longue) de la période où l'on connaît la plupart des fossiles (même si l'histoire de la vie a commencé bien avant le début de cette période, peu de fossiles aussi anciens qui permettraient de la raconter sont connus). Au début de l'ère Primaire, il y a 540 millions d'années, sont probablement apparus la plupart des grands groupes d'animaux actuels, comme les arthropodes, les mollusques ou encore les deutérostomiens ; cette période dite "explosion cambrienne" a été relatée par le grand paléontologue et vulgarisateur de l'évolution Stephen Jay Gould dans son ouvrage La Vie est Belle. Les premiers conodontes connus datent de la fin de cette époque cambrienne, et sont donc vieux de 500 millions d'années.
Un aperçu de la vie animale durant le Cambrien, il y a 500 millions d'années. Les étranges organismes représentés sur cette image constituent les premiers représentants connus de nombreux groupes du vivant. Ils sont connus principalement grâce à des fossiles du Canada et de Chine. Source et légende
Le Trias est la première période de l'ère Secondaire (ou Mésozoïque). Il a commencé il y a 250 millions d'années, s'est terminé il y a 200 millions d'années et a vu apparaître notamment les dinosaures, les mammifères, les crocodiles (du moins leurs proches parents éteints), les requins modernes, les coraux constructeurs de récifs modernes ou encore les diptères (mouches et moustiques)…
La fin du Trias a été marquée par une extinction massive de nombreux groupes d'êtres vivants (il y a eu quatre autres de ces "crises" majeures, dont la plus célèbre et la plus récente a eu lieu à la fin du Crétacé, il y a 65 millions d'années). On ne trouve pas de conodontes dans les terrains plus jeunes, on peut donc supposer que les organismes qui portaient ces conodontes n'ont pas survécu à cette extinction massive.

Pendant ces longs 250 millions d'années d'existence, les organismes qui les portaient ont laissé des fossiles de conodontes partout. Et pendant ce temps, ils ont évolué.  Et vite. Assez vite pour que les spécialistes puissent déterminer, en fonction de la forme de conodonte qu'ils ont trouvé, à quelle époque l'animal correspondant vivait. En somme, les conodontes peuvent être utilisés comme "point de repère" temporel, à chaque période étant associé son (ou ses) forme(s) (on dit aussi "espèces", même si ce ne sont pas des espèces au sens biologique) de conodontes. C'est de là que provient le terme de "fossile stratigraphique" (la
stratigraphie étant la discipline qui étudie la succession des couches géologiques à travers le temps).  Et c'est cette application (parmi d'autres) qui rend les conodontes si utiles à la géologie - les compagnies pétrolières, par exemple, s'en sont beaucoup servi.

Mais voilà, tout ça ne nous dit pas ce que c'est un conodonte. Cette question a été posée dès leur découverte, et n'a pas encore trouvé de réponse définitive. Du fait de ce questionnement et de leur importance, la nature des conodontes fut longtemps l'un des plus grands mystères de la paléontologie. Menons donc l'enquête : que peuvent-ils bien être ? 
Dès leur découverte dans les années 1850 par Christian Pander, une hypothèse a été proposée : les conodontes seraient des dents de "poissons". En effet, ces fossiles sont composés de cristaux de phosphate de calcium, un composé chimique qui n'est pas très répandu chez les êtres vivants. Il compose notamment l'os et les dents des vertébrés. Cela pose cependant deux problèmes : aucune dent de vertébré connue n'a l'apparence d'un conodonte, et aucun conodonte n'avait été trouvé associé à un organisme. Toutes les possibilités d'interprétation restaient donc ouvertes. 
Ainsi, au fil des années, les conodontes ont été assimilés à des os qui soutiennent des branchies de vertébrés, à des mâchoires de "vers" ou de mollusques, à des spicules (sortes de petites épines dans la paroi du corps) d'éponges ou encore d'algues… Presque tous les groupes d'animaux (et même en dehors) y sont passés ! 
Dès le début du XXème siècle, des conodontes de différentes formes ont été retrouvés associés entre eux. Ces "appareils conodontes" (voir image ci-dessous) ont relancé l'hypothèse "dents" ou "mâchoires" (car ils démontraient que les conodontes faisaient partie d'une structure plus large), mais toujours sans organisme entier pour la soutenir. Cet "animal conodonte" est un peu devenu un symbole de la paléontologie : un organisme dont on savait l'existence (puisqu'on connaissait les appareils conodontes), mais sans l'avoir jamais trouvé.

Un "appareil conodonte", c'est-à-dire un ensemble de conodontes de types (ou "espèces") différents que l'on retrouve connectés entre eux. Source : Palaeos

En 1973, on a pensé avoir trouvé l'animal conodonte : l'empreinte fossile d'un organisme allongé du Cambrien, qui possédait des conodontes dans son tube digestif ! Hélas, il fut démontré que cet animal avait plus vraisemblablement mangé celui qui portait les conodontes, d'où la présence de ces derniers dans son estomac. En effet, d'autres restes de divers animaux étaient mélangés aux conodontes, ceux-ci étaient en vrac et non pas arrangés de la même façon que dans les "appareils" qu'on avait déjà trouvé, et certains spécimens du même animal n'avaient pas de conodontes dans leur tube digestif. L'animal porteur de conodontes restait donc inconnu.

Il a fallu attendre…1983 pour que ce Saint-Graal soit découvert. Mais si vous imaginez que les paléontologues l'ont mis à jour dans une contrée lointaine, au terme d'une longue marche et au prix d'un dur labeur, vous serez déçus. L'animal conodonte a été découvert…au fond de la collection d'un musée !

C'est en fouillant dans des tiroirs remplis de plaques de roche provenant d'Ecosse, et vieilles du Carbonifère (entre 350 et 300 millions d'années) qu'Euan Clarkson a observé un étrange animal, allongé, portant à l'avant des conodontes. Bien caché dans son tiroir, à Edinbourg, il n'avait jamais vraiment été remarqué auparavant ! Clarkson publia sa découverte avec deux collègues, dans un article sobrement intitulé "The Conodont Animal"
(voir image et reconstitution ci-dessous). Elle a été par la suite confirmée par la découverte d'autres spécimens similaires. Pouvions-nous donc (enfin) savoir qui étaient les porteurs de conodontes ? Pas si sûr…


L'animal conodonte du Carbonifère d'Ecosse (cliquez pour agrandir). A gauche : photo du spécimen fossile, tirée de la publication originale (Briggs et al. 1983, Lethaia). A droite : schéma interprétatif montrant les différentes structures visibles sur le spécimen, et leur(s) interprétation(s) possible(s).

Là se pose un problème souvent rencontré par les paléontologues. Ils n'ont pas toujours la possibilité d'identifier une structure qu'ils observent, n'ayant que rarement accès à des techniques disponibles sur des espèces actuelles (observation du développement embryonnaire, génétique, structure et composition des tissus…).
Ce qui est sûr, néanmoins, c'est que cet animal conodonte est allongé, symétrique, et n'a pas de membres latéraux. Il n'y a pas d'autres pièces squelettiques dures, à part les conodontes eux-mêmes. Ils sont disposés comme dans les "appareils conodontes" déjà connus, et leur position à l'avant du corps, juste derrière l'emplacement supposé de la bouche, est cohérente avec leur fonction présumée (des mâchoires, des dents ou un appareil portant les branchies) ; tout cela démontre selon les auteurs que les conodontes faisaient bien partie de l'animal (et n'avaient donc pas été ingérés). A l'arrière du corps on observe des sortes de "nageoires" supportées par des rayons. Juste devant les conodontes, probablement au niveau de la tête, deux larges expansions. Le long de l'axe du corps, il y a au moins une structure linéaire. Et des séries de blocs répétés le long du corps, qu'on devine en forme de V. 
Problème : cette description peut correspondre à deux groupes d'animaux, très différents.

Le premier, ce sont les chordés. Cet animal conodonte ressemble en effet furieusement à un céphalochordé, une myxine ou une larve de lamproie. Les nageoires seraient alors de même nature que celles des vertébrés, les expansions à l'avant seraient des yeux (très développés), la ligne horizontale serait la chorde (un caractère qui définit les chordés) ou le tube digestif, et les blocs répétés seraient des blocs musculaires - ou myomères. Pour rappel, ces blocs musculaires sont propres aux chordés : on les trouve chez les céphalochordés et chez les vertébrés. On les voit bien dans les "filets", de saumon par exemple (voir ci-dessous). Pour plus d'informations sur les caractères des chordés et des vertébrés, vous pouvez aller voir nos articles ici et ici.

Des exemples de chordés. L'amphioxus Branchiostoma lanceolatum : notez les blocs musculaires en forme de V et la chorde (ligne plus claire le long du corps qui se prolonge à l'avant). En bas à droite : de la chair de saumon montrant les blocs musculaires (en rose) séparés par des myoseptes (en blanc). Sources : ici et ici

L'autre possibilité, ce sont les chétognathes. C'est un groupe mal connu de "vers" (terme qui ne veut rien dire, soit dit en passant : les "vers" en tant que groupe n'existent pas !) marins nageurs. Eux-mêmes, on ne sait pas les classer : les phylogénies basées sur l'ADN les rapprochent des protostomiens, qui incluent les mollusques, les arthropodes et les annélides, alors que leur développement embryonnaire est identique à celui des deutérostomiens, dont on a déjà parlé. On sait (par des fossiles très bien conservés venus de Chine) qu'ils existent au moins depuis le Cambrien.
Les chétognathes (voir ci-dessous) sont de forme allongée, transparents, ont des "nageoires" sur les côtés, un capuchon à l'avant (qui pourrait correspondre aux expansions de notre animal conodonte ?), la ligne longitudinale pourrait être le tube digestif… Restent les séries d'éléments en V, inexpliqués par cette hypothèse car les chétognathes ne sont pas segmentés.

En haut : vue générale du chétognathe Sagitta gazellae. Notez les "nageoires". En bas : zoom (MEB) sur la région de la tête d'un chétognathe. On distingue bien les "mâchoires" sur le côté, et le capuchon autour. La bouche est au milieu. Sources : ici et ici

Mais que faire des conodontes eux-mêmes ? Les chétognathes ont bien des sortes de "mâchoires" fines et recourbées (d'où leur nom, qui signifie "mâchoires en forme de cils"), qui font penser à certains conodontes (voir ci-dessus). Mais elles sont en chitine, un tissu non-minéralisé que l'on retrouve dans la carapace des insectes et autres arthropodes par exemple. A l'inverse, les conodontes sont en phosphate de calcium, un minéral que l'on retrouve, on l'a vu, chez les vertébrés, et notamment dans leurs dents !

Le mystère serait-il entièrement résolu ? C'est le cas pour beaucoup de spécialistes, qui pensent que ces caractères démontrent plutôt que les porteurs de conodontes sont bien des chordés, voire carrément des vertébrés sans mâchoires. C'est ce parti qui a été pris dans la jolie reconstitution ci-dessous :

Reconstitution d'un animal conodonte, interprété selon l'hypothèse qu'il s'agit d'un vertébré. Dessin de Livia Bascher.

Mais cela n'exclut pas quelques problèmes. On a vu que les structures pouvaient être interprétées différemment. Et ici, l'analyse phylogénétique des caractères n'est pas d'un grand recours, puisque le résultat dépendra de la façon dont les observations ont été interprétées, et donc codées dans l'analyse sous la forme de caractères. C'est l'anguille qui se mord la nageoire caudale !
Si l'animal conodonte est un vertébré, cela ne résout d'ailleurs pas tout. Les conodontes ressemblent à des dents, mais celles-ci sont en principe apparues chez les gnathostomes (ou un de leurs proches parents, selon des recherches récentes), un groupe défini par la possession de nombreux caractères que l'animal conodonte n'a pas : il lui manque les mâchoires, mais aussi la présence d'ossifications, et les nageoires paires ; caractères qui apparaissent chez des vertébrés non-gnathostomes sans mâchoires ni dents (pour mieux comprendre, vous pouvez vous référer à l'arbre phylogénétique en fin de mon article précédent). Il faudrait donc imaginer que l'animal conodonte a perdu tous ces caractères, ou (plus probable) que les conodontes et les dents soient apparus indépendamment, dans deux lignées différentes. 
Sur la base de ces doutes, certains militent pour l'hypothèse que l'animal conodonte fasse partie d'un groupe à part au sein des chordés, voire carrément en dehors. Un point de vue que tous ne partagent pas, d'autant plus que pour avoir des financements de recherche, il vaut mieux dire qu'on étudie des vertébrés plutôt que des "vers" marins…

Malgré ces débats apparemment sans fin, les paléontologues ne se découragent pas. Avec toujours autant d'abnégation, ils continuent pour la plupart d'entre eux d'utiliser les conodontes pour dater les roches, comme si de rien n'était. Les autres essayent de reconstituer l'animal qui les portait, et de lui donner une place dans l'arbre métaphorique de l'évolution, en se disant que les mystères comme celui-là font tout le sel de leur métier…


Quelques références : 
  • L'histoire du mystère des conodontes a aussi été racontée par l'incontournable Stephen Jay Gould dans un court essai. On peut le trouver dans le recueil Le Sourire du Flamant Rose. D'ailleurs même si ce n'est pas pour lire cet essai, je ne saurai que vous conseiller chaudement de lire un recueil (n'importe lequel) de Stephen Jay Gould ! Incontournable vous dis-je !
  •  Une page de l'University College de Londres (ici) et une autre tenue par un amateur (ici), avec des images montrant la diversité potentielle des conodontes, et des exemples d'applications.


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