Eh bien, pas si sur…
D’abord, il faut savoir que même
si les plantes sont généralement fixées, elles ne sont pas dépourvues de
capacité de mouvements, de manière plus ou moins spectaculaire. Tous ces
mouvements sont la conséquence d’un ensemble de signaux qui traversent la
plante, à l’instar des signaux transmis par les neurones chez les animaux.
Ainsi, quand on parle de
mouvement chez les Végétaux, on a en tête par exemple les changements de
position des plantes en pot en appartement qui semblent se diriger vers la lumière…
comme si elles étaient attirées par elle. En réalité, la partie de la tige
située du côté le plus sombre va subir une croissance plus rapide que la partie
située à la lumière, ce qui aura pour conséquence une courbure de la plante
vers la lumière. Pourquoi je vous parle de cela ? On n’était pas censé
parler cerveau ? Attendez un peu… Si les plantes se comportent ainsi c’est
qu’elles ont reçu un signal hormonal : à savoir celui provoqué par une
petite molécule appelée auxine. L’auxine va être déportée vers le côté sombre
de la plante et comme cette hormone enclenche des phénomènes de croissance, on
observera une croissance différentielle de la tige et donc sa courbure.
D’autres mouvements plus
spectaculaires ont lieu chez les plantes : c’est le cas chez les plantes
carnivores du genre Dionaea dont le
piège est capable de se refermer en 1/30ème de seconde sur l’insecte
imprudent qui sera venu se poser dedans. Ce mouvement très rapide est dû à un
courant ionique calcique qui se déclenche et a pour effet de changer l’acidité
dans les cellules de la nervure centrale de la feuille (qui porte le piège). Ce
changement provoque une fermeture du piège par différence de pression
hydrostatique… et l’insecte est piégé ! (Barthlott et al. 2008)
Or, les courants ioniques sont à
la base même des potentiels d’action présents dans les neurones des animaux et
qui servent à transmettre l’influx nerveux. Chez les plantes, donc, on peut
observer une analogie concernant la transmission quasi instantanée des signaux,
bien que ce ne soient pas les mêmes mécanismes impliqués que dans le cerveau.
Une petite vidéo de la BBC One (en anglais), montrant la vitesse de fermeture des pièges chez la Dionaea.
Et ce n’est pas fini ! Les
plantes sont donc capables de produire des signaux transmis rapidement à
l’intérieur même de leur organisme, mais elles sont également capables de
communiquer à distance avec d’autres plantes… et pas forcément des individus de
la même espèce ! Ainsi, Heil et Karban (2009) expliquent que les plantes
communiquent entre elles grâce à l’émission de COV (Composés Organiques
Volatils) qui sont des molécules organiques complexes produites par les plantes
lorsqu’elles sont blessées, sujettes à l’herbivorie et à la prédation. Dès que
ces COV seront captés par d’autres plantes, pas encore agressées par les
herbivores, les cellules de ces dernières vont produire des composés qui auront
pour conséquence de rentre les feuilles non comestibles, voire carrément
toxiques… tout ça alors que l’herbivore en question est encore loin.
Les plantes sont donc capables de
communiquer entre elles à distance et surtout, elles sont capables de se
comprendre et de réagir promptement à la menace de prédation.
Une dernière chose. Dans leur
article de 2005, Baluska et al. observent un fonctionnement des cellules
végétales similaire à celui des synapses des animaux : deux prolongements
cellulaires, provenant de deux cellules différentes, qui échangent des
molécules particulières : ce sont des molécules d’auxine, l’hormone dont
j’ai parlé au début. Ces échanges rapides et à l’aide de vésicules (structures
cellulaires permettant de libérer les auxines dans l’espace situé entre les
deux prolongements cellulaires) ne sont pas sans rappeler le fonctionnement des
synapses dans le cerveau. Ces signaux transmis par les auxines vont là encore
permettre à la plante de réagir rapidement en cas de blessure, afin de
« colmater la brèche » dans ses tissus par exemple.
Pour conclure, on peut dire que
les communications complexes au sein d’un organisme ne sont pas l’apanage des
animaux… et que même si les plantes ne possèdent pas de cerveau à proprement
parler, elles n’en sont pas moins des êtres vivants capables de produire des
signaux très rapides, améliorant leur propre survie !
Bibliographie
Barthlott W., Porembski S., Seine
R., Theisen I., 2008, Plantes carnivores – biologie et culture. Editions Belin, Paris
Heil M. and Karban R. 2009. Explaining
evolution of plant communication by airborne signals. Trends in Ecology and
Evolution. Vol.25 No.3
Baluska F,Volkmann
D and Menzel D. 2005. Plant synapses: actin-based domains for cell-to-cell
communication. TRENDS in Plant Science Vol.10 No.3
A ce propos, je suggère de lire le dossier du magazine Science & Vie (mars 2013) qui aborde les dernières connaissances sur les plantes dont l'équivalent du système nerveux. Très intéressant !
RépondreSupprimerC'est vrai qu'il y a des analogies, mais il y a me semble-t-il une différence fondamentale entre les plantes et le monde animal du fait que la membrane de leurs cellules sont trop rigides pour qu'elles puissent se différencier en cellules neuronales. Pas de neurones, donc pas de cerveau...
RépondreSupprimerBonsoir,
SupprimerJe pense que vous êtes en train de confondre membrane cellulaire et paroi cellulaire : toutes les cellules ont une membrane potentiellement plastique ; ce qui donne leur rigidité aux cellules végétales est une paroi de cellulose qui les entoure. Quoiqu'il en soit, le fait que les cellules végétales aient une paroi ne leur empêche pas du tout de se différencier ! Une plante peut avoir plein de tissus différents, et les cellules qui les composent seront différentes d'un tissu à l'autre, comme le sont les cellules des animaux.
En revanche, je suis d'accord avec vous pour dire que le fait que les plantes communiquent entre elles et réagissent à leur environnement ne veut pas dire qu'elles aient un cerveau. Elles, elles n'ont pas de cerveau et nous, nous n'avons pas de chloroplastes... on ne peut pas tout avoir dans la vie !
Merci pour ce bel article.
RépondreSupprimerJ'avais lu le mag science et vie dont tu parles ! Effectivement c'est hallucinant quand on y pense.