mercredi 15 août 2012

Ingénieuse et insoupçonnée...

Ce soir, j’en ai marre de travailler. Alors j’ai décidé de vous écrire un petit mot pour vous expliquer ce que c’est que l’ingénierie écologique. De quoi je parle ? Vous n’avez jamais entendu parler d’ingénierie écologie ? Autrement appelé le génie écologique…. Et bien ça veut dire qu’il était grand temps que je sorte la tête hors de mes publis scientifiques, de mes manipes de labo et de toutes mes activités bien trop sérieuses.

L’ingénierie écologique, c’est quelque chose d’assez neuf en réalité. Il n’y a que très peu de scientifiques qui s’y intéressent, mais c’est pourtant un domaine très prometteur dans la branche de l’environnement mais aussi pour nos sociétés.
Bien que le nom soit quelque peu barbare, il dit tout. L’ingénierie, vous savez ce que c’est ?! C’est quand on essaye de trouver une solution à une question concrète, un problème pratique. Et l’écologie, que ça soit scientifique ou idéologique (comme en politique ou chez les hippies !), c’est le domaine qui s’intéresse à l’environnement, au sens large, et à notre environnement plus particulièrement, à notre milieu environnant proche.  Donc pour l’expliquer en deux mots, l’ingénierie écologique c’est quand on cherche des solutions à nos problèmes dans l’environnement. Bon ça a l’air pas folichon tout ça, mais je vous assure, c’est plein de surprises ! C’est le but de mon article : vous montrer que les organismes qui nous entourent, et qui constituent notre écosystème, sont pleins de ressources et peuvent être d’une grande aide.

Avant ça, je vais vous donner une définition un peu plus « scientifique ». Odum l’a définit en 1962 comme la mobilisation de l’énergie propre à l’activité des systèmes vivants et des organismes au lieu de faire appel à la technologie et à l’énergie externe, essentiellement non renouvelable, comme les énergies fossiles. Mais une des caractéristiques de l’ingénierie écologique est qu’elle se veut bénéfique à la fois pour les humains et pour la Nature. Et c’est pourquoi elle a été préconisée par le Millenium Ecosystem Assessment (programme de travail international conçu pour répondre aux besoins des décideurs et du public en matière d’information scientifique relative aux conséquences des changements que subissent les écosystèmes pour le bien-être humain) afin de tenter de pérenniser les relations  « Homme-Nature ».

Et donc je vous parlais de surprise… vous devez vous demander à quoi je faisais référence. Ni plus ni moins qu’à tous les petits services que nous rendent les espèces autour de nous. Pour que ce soit plus parlant, on peut comparer l’ingénierie écologique au biomimétisme. Vous savez, le biomimétisme ! La science qui s’inspire des capacités physiologiques et physiques des animaux ou des plantes pour créer de nouvelles technologies. 

Vu comme ça, on se demande qui de l'homme ou de l'animal a copié sur l'autre ! [source]






Pour en savoir plus, je vous conseille de regarder les extraits de reportages au lien suivant : le biomimétisme. Pour ma part, j’ai déjà vu les reportages et ça m’impressionne toujours autant !

 
Il y a tellement d’exemples d’application de l’ingénierie écologique que j’ai un peu de mal à choisir lesquels vous présenter.
Je vais commencer par quelque chose d’assez peu ragoutant…. Les stations d’épuration. Ces centres de collecte de nos eaux urbaines et industrielles ont pour principal objectif de transformer les eaux sales et chargées en matières en eaux propres. Et bien figurez-vous que certaines de ces grosses usines n’utilisent ni plus ni moins que des bactéries dans le processus de transformation. Il existe différentes méthodes qui utilisent des types de bactéries différentes (libres ou fixées, ayant besoin d’oxygène ou non). L’intérêt de ces bactéries, c’est qu’en plus de nettoyer l’eau elles vont produire du biogaz, qui constitue une source d’énergie naturelle. 

Les bactéries sont nos amies, on vous l'a déjà dit! [sources] 








Un autre exemple dans le même style, c’est l’utilisation des racines foisonnantes des mangroves tropicales à Mayotte pour filtrer les eaux usées. Après la récolte des eaux usées et un prétraitement de décantation qui élimine une partie de la pollution, l’eau est rejetée à marée basse sur des parcelles de mangrove par des tuyaux percés comme un système d’arrosage. Ainsi l’azote contenu dans les eaux usées est absorbé par la végétation qui favorise sa croissance tel un engrais. Bien que ce type de projet ne soit qu’expérimental, il semble donner de bons résultats. Les chercheurs qui en ont la charge n’ont plus qu’à s’assurer que l’équilibre de la biodiversité n’a pas été perturbé.
 
En voilà de belles racines! [source]

Je voudrais vous parler d’autres plantes, qui sont proches de vous, qui vous rendent service, et pourtant on les oublie souvent, on fait comme ci elles n’étaient pas là. Ce sont les arbres de nos villes. Si nombreux et pourtant si invisibles. Et bien figurez-vous qu’eux aussi sont au cœur de l’attention des chercheurs pour voir en quoi ils nous sont bénéfiques. Il semblerait que les arbres urbains se portent bien (ils ont une grande ressource en carbone et azote), mais ils sont en manque d’eau. En parallèle, ils absorbent le CO2 produit par le large parc automobile français, mais ils contribuent aussi à rafraichir l’atmosphère.  Les arbres abritent une grande diversité d’organismes, des micro-organismes aux vertébrés en passant par les milliers d’invertébrés qui y élisent domicile. Ils contribuent à ce qu’on appelle la Trame Verte, cette continuité végétale qui permet de réduire la fragmentation des habitats naturels des animaux. Et cela contribue à notre bien-être et à notre besoin de nature !

Nos beaux arbres parisiens... on devrait en prendre soin comme ils prennent soin de nous [source]

Toujours en lien avec les plantes, mais plutôt de celles dont on va se nourrir, je voudrais maintenant vous parler d’agriculture. La France est la championne européenne de l’agriculture, mais ça n’est pas un secteur de tout repos. Les agriculteurs sont soumis à de nombreuses catastrophes climatiques mais aussi à des épidémies de pathogènes. Et bien il serait peut-être possible de lutter contre certains pathogènes des cultures en utilisant un agent de lutte très particulier…. Le ver de terre !!! Les vers de terre pourraient favoriser la croissance du blé et réduire les attaques d’un champignon, le piétin, sur la plante. Les vers limiteraient le contact entre le piétin et le blé, notamment en enfouissant les débris végétaux sur lesquels se déposent les spores des champignons .

Le piétin verse donne une couleur plus clair au blé [source]

Les vers de terre, connus pour être "ingénieurs des écosystèmes" [source]

Enfin un dernier exemple, plutôt original mais qui me tient à cœur : les toits végétalisés. Ils créent des zones de verdure dans nos villes bien grises. Ils ont plusieurs objectifs : isoler thermiquement les immeubles, améliorer la qualité de l’eau en ville, séquestrer le CO2, re-dynamiser la biodiversité locale et régionale. Ces petits espaces au dessus de nos têtes pourraient dans un avenir proche constituer de véritables écosystèmes artificiels, abritant une multitude d’espèces, animales, végétales, et de micro-organismes. 
Ça fait rêver, n'est-ce pas?! [source]
 Il y aurait encore beaucoup d’exemple à donner pour illustrer les actions des ingénieurs écologues:
- La phytoremédiation et la bioremédiation utilisent des plantes et des micro-organismes pour dépolluer les sols (en phase expérimentale en France)
- Construire des zones humides artificielles pourrait réduire la pollution par les pesticides des nappes phréatiques.
- Le recyclage de déjections porcines dans les élevages et leur réutilisation en champs permet de minimiser les pollutions tout en produisant plus de biomasse végétale.
- Etc.
 Cette discipline en pleine essor n’a pas fini de faire parler d’elle, et surtout elle a encore beaucoup de cartes à jouer pour nous en mettre plein la vue. Alors restez attentifs, on ne sait jamais ce qui se cache derrière un organisme vivant ! 

A bon entendeur

Battle

Pour en savoir plus:
- le site internet du groupe d'application de l'ingénierie écologique (GAIE) : ici 
- le numéro spécial du CNRS sur l'ingénierie écologique: "Ingénieuse écologie" 
- le numéro spécial du journal du CNRS sur le biomimétisme: "La Nature pour modèle"

2 commentaires:

  1. Très intéressant domaine, merci de me l'avoir fait connaitre.

    (vous croyez qu'il est dopé aussi l'insecte sur sa fougère ?)

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  2. Très contente de vous l'avoir fait découvrir :)
    (Cette mante n'a pas l'air bien stressée par la vie, je doute qu'elle soit pressée d'arriver à destination sur ce magnifique vélo imaginaire)

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